Antoine était seul dans la salle aménagée en chapelle au fur et à mesure de ses visites au centre.
Le jeune curé de Jean-le-Duc venait régulièrement célébrer des messes pour les patients et le personnel du centre Cathara.
Il n'aurait jamais imaginé devoir un jour prononcer ici même une messe pour la mémoire du médecin chef de l'établissement. Et c'est précisément ce qu'il devrait faire dimanche, puisque tout le monde serait encore bloqué ici.
Vêtu simplement de sa soutane, il priait humblement devant l'autel aménagé entre les deux fenêtres de la salle. Il priait pour le salut de l'âme du Dr Narcisse. Il priait pour tous les gens présents dans le centre. Il priait pour le repentir de l'assassin, qui que ce soit.
Enfin, il priait pour lui même, pour trouver la force de rester un guide vigilant dans ces moments de troubles.
Quelques minutes de calme encore.
Quelques minutes de paix.
Quelque minutes seulement...
Bientôt il devrait se lever et rejoindre les gens qui attendaient déjà dans le grand salon pour l'interrogatoire.
Devant ses yeux défilaient les images du cadavre du médecin-chef qu'on lui avait fait constaté le matin même de la découverte. Ce moment fut un choc. Comme à chaque fois. Il n'avait jamais réussit à rester insensible devant la mort. C'était pourtant la volonté de Dieu.
Depuis la guerre ou il avait été au chevet de dizaines de mourants, de blessés graves il avait eu l'occasion d'en voir, des souffrances. Pourtant, le choc restait le même à chaque fois. Comme perpétuellement nouveau.
Comme ce matin fatidique.
"...et ne nos inducas in tentationem
sed libera nos a malo
Amen"
D'une voix étouffée, le curé termina le pater, respira un grand coup, se leva et embrassa l'autel.
Il regarda Jésus son berger avec une infinie tristesse, cherchant la force en lui.
Puis d'un pas lent, il sortit de la petite salle, tout à fait déserte à présent...